Tailleur de vers
Tailleur de vers
Si j'étais tricoteuse, je monterai des mailles,
Tous les rangs de l'histoire, sans qu'un point ne défaille.
Mais las, je suis mêleuse, emmêleuse de mots ;
Pour écrire un récit il faut un écheveau.
Il doit filer le texte, je dois coudre les phrases,
Crocheter l'adjectif avec le nom commun,
Bien réfléchir au temps et au verbe opportun,
Et, il faut, qu'à la fin, toute la strophe s'embrase.
Souvent l'ombre des mots circule dans ma tête
Je tourne le regard pour voir leur vraie nature
Et là, j'en trouve deux qui se content fleurette
Alors que moi je peine et que je me torture.
Mais il y a aussi tous ceux qui me font face
Ceux qui regardent même dans la maison d'en face
Petits voyeurs discrets ou grands explorateurs
Ces termes de français peuvent être grand tailleur.
Car tricoter c'est bien, mais coudre n'est pas mal.
Pour ma part, je préfère un projet de découpe
A une page noircie de lettres qui cavalent
Et qui n'arrivent pas à se remettre en groupe.
Dans le poème aussi les aiguilles sont fines,
Le fil est de couleur, la piqure est tendue,
Je faufile d'abord pendant que j'imagine,
Je repasse à voix haute, j'écoute le rendu.
Véro d'O
07 juillet 2011